Après le Japon, la Chine, l'Indonésie et l'Inde, le Tour du Monde des Garages (et des Ménestrels) s'était arrêté au portes de l'Europe, en Turquie. Profitant de cette halte pour rassembler les forces et les provisions nécessaires à un périple sur le Vieux Continent, Infrason avait alors confié à son correspondant spécial (Nikki Mod) le soin d'explorer les contrées brûlantes du Moyen-Orient et de l'Afrique.
Sans nouvelles de notre reporter depuis plusieurs moi, nous craignions le pire, d'autant qu'un caravanier affirmait avoir vu la carcasse de son dromadaire perdue dans le désert. C'est donc avec un réel soulagement que nous avons reçu hier un parchemin usé, signé par Nikki Mod depuis Sana'a, la capitale du Yémen. Je vous en livre le contenu :
Mohammad Al-Harithi
Allah a inventé le rock n'roll
La légende voudrait que, quelque part entre le sixième et le neuvième siècle de notre ère, un bédouin mit au point au fin fond du désert d'Arabie un curieux instrument à douze cordes pour déplorer la mort de son fils et chanter au ciel son désarroi.
L'objet prit le nom de ûd, et devint bientôt très répandu dans l'ensemble du monde arabe. Il s'agit de ne pas s'y tromper : instrument d'accompagnement ou de solistes souvent virtuoses, le ûd, par le son produit, est la Telecaster du Moyen Orient. Ce qui est susceptible de sortir de cette chose est potentiellement aussi primitif qu'un solo des Cramps, aussi sauvage qu'un gimmick d'AC/DC, aussi beau et sensuel qu'une balade dylanienne chantée sur un chameau.
Les thèmes clamés sont le plus souvent religieux, mais il faut croire que le Dieu de là bas a quelque chose de spécial, entre un iguane au soleil et un cobra des mille et une nuits. Un jour prochain, quelqu'un dans le désert aura l'idée de brancher son ûd sur un gros ampli Vox à lampes, et ce sera le début de l'apocalypse.
En attendant, il s'agit de prêcher la bonne parole, et de se soumettre à la mélopée du yéménite Mohammad Al Hariti, l'un des joueurs de ûd contemporains les plus connus ; pour ne pas dire un «ûd hero». Dans un album édité sous le titre L'heure de Salomon, le fou ose un «Par Dieu, que ce lieu contient de belles !», qui ne lui a pas même valu une Fatwa....
Mohammad Al-Harithi - Li-Llah Mâ Yahwî Hadha-I-Maqâm'
Mohammad Al-Harithi - Rahmân Ya Rahmân
Faisal Alawi
S'il était né à Perigeux aujourdhui, Faisal Alawi aurait peut être joué du métal. Heureusement issu ses contrées plus ensoleillées du Yémen, ce barde là a adopté le ûd, et se donne en spectacle au milieu d'un public dont on entend les hurlements tous féminins. Ça chauffe dans les burqas. Peut être le live le plus féroce entendu depuis longtemps, dont le titre des morceaux est cependant tombé dans l'oubli.