mardi 27 novembre 2007

Le Tour du monde des garages (2) : Chine

Partis du Japon, nous embarquons à Osaka, direction Tianjin. Puis deux petites heures de train jusqu'à Pékin. Disons-le tout net : nous n'avons pas posé nos pieds sur une terre de mélomanes ; la variété chinoise est simplement atroce, peut-être autant que l'italienne...ce qui n'est pas peu de choses! Mais si nos amis transalpins peuvent décemment se reposer sur les lauriers des Vivaldi, Albinoni ou Paganini, les Chinois n'ont même pas cette alternative. Avez-vous déjà écouté un seul de leurs opéras? Non? Alors comment vous expliquer? Cela se rapproche un peu du "Doux rossignol" interprété par les deux méchantes soeurs de Cendrillon (pour ceux qui auraient oublié leurs Walt Disney, cliquez ) : des voix suraiguës et stridentes accompagnées à la flûte par la classe de 6e du collège Armand Roncet de Chanteneuve-lès-Essarts. Voilà pour le tableau.

Mais pour qui sait tendre l'oreille, la belle musique finit toujours par apparaître : sous les guitares de PK14 par exemple. Originaire de la "capitale du sud" (Nankin), ce groupe s'est installé dans la "capitale du nord" (Pékin). Le morceau qui suit est une de leurs démos ; elle me fait fortement penser à du Joy Division avec la basse très en avant et le côté franchement sombre. Assez fascinant en tout cas.



Maintenant, direction l'autre Chine : Hong Kong. Nous y retrouvons My little airport qui pourraient être les Raveonettes chinois : même amour pour les voix et les tambourins spectoriens, même penchant pour les fonds "bruitistes" saturés à la Jesus and Mary chain ou Sonic youth. Particularité : nos amis chantent à la fois en chinois, en anglais et même...en français (pas toujours intelligible, il est vrai, mais il ne faut jamais décourager les bonnes volontés). J'entends d'ici vos questions : est-ce que c'est du mandarin ou du cantonnais? Qu'est-ce que les paroles signifient? Je vous répondrais que ... et bien ... euh ... vous n'êtes qu'une bande d'assistés qui attendez que les informations vous tombent toutes crues dans la bouche. Et, dans le monde moderne, il n'y a plus de place pour les individus de votre espèce!

My little airport - 失落沮喪歌
(site / Myspace / acheter 只因當時太緊張 chez Monitor records)

PS: Message spécial aux dirigeants chinois : s'il vous plaît, pourriez-vous débloquer l'accès à ce blog dans votre pays? En échange, je vous aiderai, comme Microsoft et Google, à traquer vos dissidents. Et même, je pourrais vous aider à inventer de nouvelles tortures (chinoises) pour vos láogăi ; et notre président (en visite en ce moment à Pékin) vous donnera des bons de réduction sur les chars d'assaut et les chasseurs Dassault. À bon entendeur, salut!

mercredi 21 novembre 2007

Electrocute


Scène de soirée.
Cette surprise-partie a tout pour être réussie : vous avez intelligemment déplacé le fauteuil du salon afin de faciliter mouvements et déplacements, puis astiqué le sol avec énergie. Pour les boissons, seuls les meilleurs crus ont été sélectionnés ; comme pour les invités. Et puis, surtout, cela fait une semaine que vous préparez cette compile, une tuerie absolue avec des enchaînements Garage 60s / Power Pop, le tout saupoudré de quelques hymnes Punk : Undertones, Easybeats, une face B des White Stripes...Enfin bref, tout cela promet.

23h : la plupart des gens sont maintenant arrivés. Le grouvomètre monte soudain de trois degrés lorsque l'ampli Sennheiser envoie les premières notes de "My generation". Mais avant que Roger Daltrey ait achevé la première strophe, la chanson s'arrête...laissant place à la grosse voix de Sean Paul. Ça, c'est forcément un coup de Théodoric, un ami sympa mais avec qui vous vous prenez régulièrement le chou. En deux enjambées, vous bondissez jusqu' au mécréant, prêt à l'empaler sur un pique à olives. Ici, c'est chez vous et personne n'a le droit d'y faire pénétrer des disques extérieurs sans visa, encore moins de les introduire dans votre chaîne hi-fi et, a fortiori, si c'est pour interrompre une chanson des Who.

Mais Théodoric, un breuvage transparent dans une main, quelques curlys dans l'autre, justifie son geste avec le culot imperturbable des sans-gêne et des criminels en série. Monsieur en a marre de ce qu'on écoute depuis tout à l'heure. Ce qu'il veut, c'est quelque chose pour danser. Vous avez beau répliquer, d'un ton volontairement cassant, qu'il faut vraiment être un crétin ou un butor pour ne pas pouvoir danser sur "My generation", le renégat persiste, repoussant les limites de la provocation et du mauvais goût. Monsieur ne veut pas de la musique de papis ; et tout en laissant échapper un curly de sa main, il explique qu'il lui faut des boîtes à rythme, des basses martelées, des sonorités électroniques. En somme, Monsieur souhaite faire de votre appartement une boîte de nuit bon marché.

Évidemment, il y aurait mille arguments pour écraser ces propos dégénérés sous le marteau du mélomane. Mais vous connaissez trop bien cette tête de mule de Théodoric et, ce soir, vous êtes trop las pour partir en croisade.
Alors il reste votre arme secrète. Si Monsieur, qui par mégarde vient d'écraser le curly aux cacahuètes sur votre moquette, veut danser, le Troublesome bubblegum d' Electrocute le remuera tel un damné sur la piste de danse. Deux berlinoises qui mélangent frénésie électro et excitation digne des Headcoatees ou des Shangri-las : voilà qui pourrait réconcilier la terre entière. Achtung! Dank Electrocute wird es immer getanzt!

Electrocute - Car bomb derby
Electrocute - Shag ball
(Myspace ici / Acheter Troublesome bubblegum sur Amazon)

PS : Infrasons fêtera bientôt ses deux mois et il serait grand temps d'effacer les morceaux mis en ligne en septembre ou début octobre. Pour ceux qui ne les auraient pas encore écoutés, je laisse une dernière semaine de répit avant d'entamer l'autodestruction. À commencer par le premier message sur Evie Sands.

lundi 12 novembre 2007

La minute yéyé (3) : Michel Sardou

Avant d'encenser les "Ricains", le traître national Michel Sardou vendait son âme à la perfide Albion. Dans "Mods et rockers", le voici pris en train d'entonner un scandaleux "j'apprécie votre terre [...] et je crie très fort : vive l'Angleterre!"... Tssss!
Mod ou rockeur ? Après cette chanson, l'ami Michel a finalement choisi une troisième voie : chanteur de variété pénible. Dommage.

Michel Sardou - Mods et rockers
(Acheter Raconte une histoire à la Fnac)

PS : Un scoop de dernière minute : je viens d'apprendre que les paroles de cette pépite sont signées Patrice Laffont, le présentateur de Pyramides, Fort Boyart ou des Chiffres et des lettres ! En quelque sorte, nous avons là le fruit d'une rencontre entre deux génies ; et non des moindres.

lundi 5 novembre 2007

Public nuisance

Méfions-nous des apparences. S'il vous arrivait de tomber par hasard sur l'album Gotta survive de Public nuisance (ce qui, de toute façon, a peu de chance d'arriver), voilà à peu près ce que vous penseriez :

-Quelle apparence étrange! L'un d'eux a quasiment un look gothique avec un bouc en fourche et une chevelure vampire. Son compère sur la baignoire ressemble à un immigré costaricain, moustache hidalgo et nuquette désordonnée faisant foi. Un troisième larron, au fond, ferait plutôt petite frappe de la fin des années 1970 avec son gros blouson et sa pose menaçante. Enfin, le dernier de ces messieurs pourrait être un texan endimanché surgi des années 1890. En fait, tout cela est faux : nous avons à faire ici avec un groupe 60s.

-S' il s'agit d'un petit groupe ricain de la fin des années 1960, c'est sûrement un de ces énièmes combos garage entendus sur les compilations Nuggets ou Pebbles. L'album contient certainement une 735 038e reprise de "Louie Louie" et une floppée de chansons à deux ou trois accords. Et puis avec un nom comme Public nuisance, attendons-nous à une musique sauvage, sorte de préfiguration des Stooges ou du MC5. Tout cela est encore faux : le morceau "7 or 10", ici en écoute, est une ballade folk des plus délicates, servie par une mélodie douce et somptueuse à la fois, plus proche d'un Neil Young ou d'un Nick Drake. Public nuisance ne ressemble à rien de connu : sa musique est trop riche et éclectique pour être réduite à du garage. Nous saurions plutôt parler d'un groupe Pop, dans le sens noble du terme ; comme Love, les Byrds ou les Doors.

-Avec des chansons de cette qualité, il doit s'agir, sinon d'un groupe à succès, au moins d'un groupe culte. Non, même pas : leurs seuls enregistrements n'ont été publiés qu'en 2002 et, tout cela, à cause d'un des plus célèbres crimes du XXe siècle.
Explications : Public nuisance signa en 1968 sur le label Equinox, dirigé par le célèbre producteur Terry Melchers. Ils effectuèrent alors deux sessions d'enregistrement. Ce même Terry Melchers refusait au même moment de produire la musique d'un illuminé nommé Charles Manson. Gourou d'une secte appelée "La famille", celui-ci décida de se venger en envoyant ses adeptes massacrer la maisonnée de Melchers. Or, sa villa californienne venait d'être vendue à Roman Polanski et sa femme, l'actrice Sharon Tate (la Sarah du Bal des vampires). C'est donc Mme Polanski, enceinte de 8 mois et demi, ainsi que 3 autres persnonnes qui subirent le couroux du gourou, le 9 aôut 1969. Ébranlé, Terry Melchers cessa ses activités, laissant les bandes de Public nuisance au placard pour 34 années.


Public nuisance - 7 or 10
(site ici, acheter à la Fnac)